"Les arbres des montagnes écrivent dans l'air des histoires qui se lisent quand on est allongé dessous" (Eric De Lucca)
"Les arbres des montagnes écrivent dans l'air des histoires qui se lisent quand on est allongé dessous" (Eric De Lucca)
Grand prix du court Automne 2017 -
Les adieux d'un ancien à sa ferme. Un texte sur la vieillesse et la douleur de devoir quitter sa maison, témoin de toute une vie.
Découvrir cette nouvelle dans "Cahiers d'un chevrier qui venait de la ville"
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Il est cinq heures du matin. La nuit africaine chevauche encore Amboseli. Dans une brassée de minutes, l’aube va peindre la savane. Nos regards se croisent. Nous échangeons un sourire. L’heure n’est pas aux phrases, les mots sont inutiles. Le camp est encore un lieu oublié des hommes. Nos guides Massaïs nous ont appris à respecter le silence de l’aurore. Pourtant, à une trentaine de mètres, au centre du bivouac, nous devinons dans le rougeoiement des braises qu’il attise, la silhouette de Thomas, notre cook. Recouvert de sa shuka, bientôt il préparera le thé, bientôt nous nous saluerons, bientôt nous palabrerons. Complice de l’ombre, il sait notre présence muette. Il prend garde de l’ignorer. Ce matin doit rester secret. Nous sommes là, elle et moi, sales et poussiéreux, les cheveux emmêlés, assis en tailleur devant notre tente, tremblant déjà d’émotion en prévision de cette féerie dont nous avons tant rêvé. À l’orée de cette journée, nous partageons un instant de plénitude intime. Il y a une semaine, en France, un maire nous a mariés, aujourd’hui, dans l’odeur chaude de la savane, le soleil du Kilimandjaro scellera notre union à jamais. Les fragments de nuit tissent encore autour de nous un réseau de bruits indéfinissables : craquements, frôlements, appels ténus, grognements de prédateurs, gémissements de victimes. Cependant nous pressentons l’embrasement. Ils sont là, à mes côtés, je les ressens. Ceux qui ont tant aimé cette terre avant moi. Karen Blixen, Kessel, Hemingway et quelques autres. Je leur parle. Ils répondent de ces quelques mots qu’ils ont écrits et que je chuchote afin ne pas troubler cette furtive magie :
« Il me semblait que j’avais retrouvé un paradis rêvé ou connu par moi en des âges dont j’avais perdu la mémoire. Et j’en touchais le seuil. »
Soudain c’est l’explosion pourpre. Le contour du Kilimandjaro se dresse, fidèle à cette vision de l’auteur du Lion. « Une “dalle plate et blanche, comme un autel dressé pour ses sacrifices à la mesure des mondes”
Nous baignons dans un flamboiement rosé. Débordant le massif, il se propage rapidement, envahissant la savane environnante, noyant la brousse toute proche, se hissant aux flancs de la cime enneigée. Dans la plaine, les arbres, les arbustes, les herbes en touffes, les animaux, les cours d'eau, sont capturés. Le temps ne s’écoule plus. Il bascule dans un torrent de lumière colorée qui, rapidement, tourne au rouge puis à l’amarante.
Nous nous sourions, amoureux, le regard embué par tant de beauté. Ce matin, l’œil est le prince du monde
. L’Afrique s’éveille. Nous nous embrassons. Le soleil s’est levé une fois de plus sur le Kilimandjaro.
.
Déjà, à l’état de fœtus, j’étais conscient de ma différence. Flottant dans le bouillonnement du ventre maternel, je percevais les sons, je subissais les odeurs. Je m’ennuyais. Cette monotonie prénatale fut sans doute à l’origine de ma première expérience de dissolution. J’ai tué mon frère, ou plus précisément, je l’ai fait disparaître dans les brumes de mon âme. Il était là, tout près de moi, je le sentais, nous partagions le même œuf. Je l’ai regardé, si petit, si fragile, j’ai capturé son image puis j’ai fermé les yeux. Un peu à mon insu, dans les méandres de mon imaginaire, j’ai laissé monter cette brume verte qui avait la couleur pâle du jade. Tel un brouillard matinal stagnant sur la plaine, comblant les creux, cimentant les arbres, partout en moi cette vapeur était présente. On eût dit qu’elle occupait les moindres anfractuosités de mon inconscient. Rapidement, le nuage fut suffisamment épais pour masquer les contours de mon jumeau. Alors, j’invoquais le souffle orageux. Au gré du vent divin, la brume a disparu, emportant mon frère. J’ai ouvert les yeux, j’ai compté les battements de cœur, les miens, ceux de ma mère… J’étais seul. Poursuivant son reflet onirique, l’existence même de mon double fœtal s’était évanouie. Quelques jours plus tard, j’ai entendu le cri de mes parents, j’ai discerné leurs pleurs. Un homme, que mon géniteur appelait « docteur » a déclaré d’une voix persuadée :
— C’est impossible ! Un fœtus ne peut disparaître ainsi du sein maternel. C’est une aberration médicale ! »
Intérieurement je riais de cette amusante plaisanterie. Puis je compris ce qu’il venait de dire : j’étais une anormalité, une erreur, une anomalie. Je sentis une onde de peur m’envahir. Ce pouvoir insensé que je détenais avait pour seul objectif de détruire l’humanité au jour de ma naissance. J’étais l’antéchrist !
Au cours des quatre-vingt-treize jours qui précédèrent mon extraction, je construisis un mur autour de moi. À mon avènement, je devins prisonnier d’une forteresse mentale destinée à protéger les vivants. Étendu dans mon berceau, j’appréhendais les sons, je devinais les mouvements, mais je ne les voyais pas, eux, les vivants. J’ignorais ce qu’ils étaient, il m’était impossible de les imaginer, je ne pouvais les anéantir. Entre eux et moi se dressaient les remparts de mon imprenable citadelle. Ils ont frappé, ils ont cogné, ils ont tout essayé. Mon bastion de confinement tenait bon. Ils furent légion à tenir le siège de mon isolement. Puis vint le jour de mes huit ans. Une femme à la voix douce et aux gestes tendres m’a parlé. Sa voix était beaucoup trop proche. Je n’ai pas vu poindre le danger. J’ignore comment elle est rentrée. La muraille soudainement s’est écroulée. J’ai vu mon père, ma mère. J’ai pleuré pour la première fois de ma vie. Ils m’ont embrassé. C’était si aimant, si sucré. Pour prolonger cet instant, j’ai fermé les yeux. Ils étaient là, dans mon esprit, tous ! Mes parents, le docteur, l’infirmière, ces gens de la rue, ces citadins tous semblables, cette population mondiale que, jusqu’alors, j’avais ignorée. L’humanité ! C’est alors que la brume est montée. Bien plus profonde que celle qui avait emporté mon frère, bien plus soutenue, bien plus puissante, d’une inquiétante couleur de malachite. J’ai hurlé, j’ai crié !
— Courrez ! Laissez-moi, éloignez-vous de moi !
J’ai soufflé pour dissiper le nuage. Il a tout emporté. Que le ciel est beau, que la mer est bleue. Je suis là, vivant libéré. Seul sur une terre désertique, sans muraille pour me protéger. J’ai peur.
« À tous mes partenaires de scène qui furent si nombreux à me donner la réplique »
Cyrano de Bergerac, acte deux, Scène 6 :
« Que l’instant entre tous les instants soit béni, où, cessant d’oublier qu’humblement je respire. Vous venez jusqu’ici pour me dire... »
Me dire quoi ? C’est le silence. Regards braqués sur moi, effroi. Le trou de mémoire est une mise en abîme. Je suis perdu, dépersonnalisé, enfermé dans une coquille de noix vide.
Je fais quoi ici ? je suis qui ? Un personnage vivant son dernier acte ?
Un comédien égaré en quête des quelques tirades à déclamer, que le nez de scène a, par un soir de salle comble, contraint à fouiller les méandres de sa mémoire chancelante ?
Sur mon dernier acte, le rideau va tomber. C’est la fin du spectacle. Le public va rentrer chez lui, content ou mécontent. Je redeviendrai moi-même. Mon personnage n’existera plus. Il survivra dans vos mémoires le temps d’un oubli. C’est l’auteur qui en a décidé ainsi. Il n’y a plus rien à jouer, plus rien à raconter. À cette exigence, histrion, metteur en scène et spectateurs doivent se plier. Aucune discussion ne sera tolérée.
Mais pour moi, baladin des planches passées, jouer mon dernier acte, c’est autre chose ! C’est faire mes adieux à la scène, à mon public, à ce métier qui a fait de moi ce que je suis. Demain ne sera pas, demain ne sera rien !
Qui doit choisir ? Qui est en droit de décider qu’il est temps pour l’artiste de s’affubler, pour l’ultime fois son faux nez ? Le comédien lui-même, parce qu’il est fatigué ou qu’il n’y croit plus ? Le metteur en scène qui n’a plus de rôle à lui confier ? L’auditoire qui un soir ne vient plus, ou bien la maladie, comme pour maître Poquelin qui en malade imaginaire vécut une mort exemplaire.
Je fais quoi ici ? Ai-je des choses à dire ? Qui suis-je donc ?
Tous m’envisagent, tous présument quelque chose de moi. Pourquoi suis-je là ?
Pendillons, face, lointain, coulisses ! Ça me revient ! Je dérive sur un plateau de théâtre ! Ils sont le public, je suis l’artiste. Lorsque la chape sèche a vrillé mes souvenirs, je m’apprêtai à interpréter le dernier acte d’une pièce commencée il y a…
Je ne sais plus. Spectateur pardonne moi. Tu es gentil d’applaudir mes erreurs, de couvrir mes hésitations. Tu crois bien me connaitre. Il y a si longtemps que sur moi brule cette rampe. Je suis le dernier. Mes partenaires sont partis vers un ailleurs que j’ignore. Ils ont disparu sans laisser d’adresse, me confiant le souvenir d’une tendresse infinie.
« Je me suis donc battu, madame, et c’est
tant mieux,
non pour mon vilain nez, mais bien pour vos beaux yeux. »
À quoi bon poursuivre ? J’ai tant de fois postillonné ce texte. Cette œuvre est si longue ! Je dois me reposer ! Laisser à Savinien le soin de se débrouiller. Il a suffisamment vécu à travers moi, le bougre. Place au « Pantalone » » inspiré qui a des choses à vivre ! Le théâtre n’a plus rien à faire du vieil abruti que je suis. Il m’a tout pompé, tout pris ! Il se passera de moi, comme moi je saurai me passer de lui ! « Finita la commedia”, le spectacle est terminé… Et que sur l’artiste tombe l’ultime rideau !
Non ! Machiniste, attends ! Je me souviens du final ! Je suis Cyrano de Bergerac, héroïque bretteur et :
« Je
me bats ! Je me bats ! Je me bats !
Oui, vous m’arrachez tout, le laurier et la rose !
Arrachez ! Il y a malgré vous quelque chose.
Que
j’emporte, et ce soir, quand j’entrerai chez Dieu,
Mon salut balaiera largement le seuil bleu,
Quelque chose que sans un pli, sans une tache,
J’emporte malgré vous et c’est...Mon panache. »
Le rideau s’effondre. Le public applaudit, il pleure, il crie. Ces bravos sont-ils pour moi ? J’ai choisi cette fin, est-elle réussie ? Roxane me sourit. Que tu es belle jeune fille ! Dans tes yeux mascaras perle une larme. Mon Dieu, m’aimerais-tu ? Tu es si joliment triste, ton sourire sanglote un adieu.
Pardonne-moi Magdelaine, j’ai trop souvent simulé cette mort. Aujourd’hui, je voulais l’exister pour qu’elle devienne mienne. Mais je ne suis pas Cyrano de Bergerac. Venez ma dame, allons saluer une dernière fois notre public !
Dans tout rouage, il y a ce petit grain de sable qui, souvent, détraque les machines les plus sophistiquées. Comme il doit être frustrant, lorsque l’on s’efforce de prévoir l’imprévisible, de se heurter au petit imprévu que nul ne peut prévoir !
Martin avait tout prévu ! Son abri antiatomique, anti-cataclysme, anti-catastrophe, antitout, passait pour être le plus sécurisée de la ville. Enfoui à soixante mètres de profondeur sous la magnifique piscine, il jouissait d'une renommée certaine.
Six années plus tôt, lorsque Martin avait entrepris son chantier, les voisins avaient beaucoup ri.
« Quel illuminé ce Martin ! Il croit encore à l’holocauste ! »
Puis, au fil des années, les rires s’étaient métamorphosés en sourire légèrement ironiques.
« Un tel abri individuel, perte de temps et d’argent ! Les abris collectifs sont bien suffisants ! »
Avec le temps, les sourires devinrent grimaces jalouses.
« Quel égoïste ce Martin ! Un abri de cette taille pour lui seul et sa famille. Il y a là-dedans quelque chose d’inconvenant !
Aujourd’hui, les voisins de Martin considéraient ce dernier avec condescendance.
« Cher Martin ! Nous sommes amis, n’est-ce pas ! Vous pouvez compter sur nous. Et nous savons pouvoir attendre de vous une même fraternité désintéressée. »
Martin répondait de ce sourire moqueur dont tant de fois il avait fait les frais. Il avait tout prévu ! Son abri était parfait !
Et, autour de la piscine, la vie continuait, sereine et tranquille. Jusqu'au jour où sans déclaration de guerre, le conflit géant éclata. De la ville, il ne resta rien ! Exception faite bien sûr de l'abri antitout de Martin.
À la destruction « grand format », il avait résisté. Sous la terre, dans un havre de paix, l’air pur circulait. Dans la fontaine centrale l'eau claire chantait, fraîche et pleine de vie. L’abri méritait bien les éloges de son propriétaire. Il venait de résister à la plus terrible catastrophe de l’histoire du monde.
Logique, Martin avait tout prévu.
Tout, sauf une insignifiante chose. Un détail sans danger pour l’abri. Lorsque les démons de feu soufflèrent la ville, Martin, en compagnie de sa petite famille, fêtait joyeusement le quarantième anniversaire de son frère, à trois kilomètres de son merveilleux abri.
Khal hume la terre grise et sale. De ses doigts tordus à l’extrémité desquels poussent déjà de longues griffes acérées, il gratte rageusement. Des charognes, des détritus, rien que de la pourriture à se mettre sous les canines. Il ne peut encore se décider à croquer des cadavres de bêtes ou d’hommes. Il n’est pas encore passé de l’autre côté, il se sent encore trop humain. Ces frères, ou plutôt ses cousins n’ont pour leur part aucun scrupule. Il faut survivre ! Semblent-ils lui dire.
Comme j’aimerais vous comprendre mes cousins rats, comme j’aimerais vous ressembler. C'est vous qui remplacerez l'espèce humaine, vous êtes les seuls à pouvoir résister à cette parodie du monde. Si vous m’acceptez, je vous guiderai. Mais avant tout ma transformation doit être complète. Je dois quitter cette enveloppe mi — humaine, mi — ratte, dans laquelle j’étouffe.
Khal se redresse. De courts poils gris et soyeux recouvrent déjà une partie de son corps courbé. De ses petits yeux rouges, il contemple les ruines. Plus grand-chose à tirer de la cité agonisante. Quelques massives demeures ont en partie résisté. Elles tiennent encore, branlantes, abandonnées, lépreuses, poussiéreuses, fissurées, mais debout. Tout homme aurait eu le réflexe de s’y réfugier, pas Khal. Il cherche les égouts de la ville. Le territoire des rats ! Celui dans lequel seuls quelques chasseurs imprudents osent s’aventurer. On ne traque pas le rat dans son domaine. On le laisse vivre en paix. Maître Surmulot, s’il le désire, peut détruire le peu qu’il subsiste de l’humanité à présent condamnée. Il n’y a plus de naissance dans le camp des humanoïdes. Horriblement contaminés, les ultimes survivants résistent pour eux seuls, ils n’ont que faire de la continuation de l’espèce.
— Les égouts ! Si je pouvais trouver les égouts ! Il me serait facile de m’y cacher. Je dois fuir les hommes qui me traquent au nom de ma différence. Ils veulent me tuer. Pour eux, je suis un monstre. Il m’appelle l’homme rat, s’ils savaient comme je les méprise. Quand j’aurai rejoint mes cousins, quand ils seront devenus mes frères, quand ma transmigration sera achevée, j’exterminerai cette race maudite de bipèdes. Pour parvenir à mes fins, je dois sacrifier ce qui subsiste de mon corps. Pourquoi avoir peur ? Ce ne sera pas la mort, rien qu’une étape indispensable.
Khal, se dissimulant dernière les décombres, parcourt le chaos. Parfois il interrompt sa progression, respirant l’air saturé d’odeurs fétides. Des charognes qui pourrissent, rien d’autre à se mettre sous les canines ! Il sent soudain un parfum familier, aimé… Comme une présence amicale. Il se retourne. Ils sont là ! Les rats. Combien sont-ils ? Cent, deux cents… Qu’importe, ils le regardent, ils n’attaquent pas. Ils l’attendent, lui ! Ils l’acceptent, Ils le veulent ! Les fourrures s’approchent frémissantes, l’entourent délicatement, le reniflent. Khal se couche à même le sol. Il caresse les douces toisons. Ils sont aussi gras qu’il est maigre. Ils mangent à leur faim, eux ! Ils ne s’embarrassent pas de stupides préjugés humains : toute charogne est bonne à croquer.
— Viens avec nous ! disent-ils
Khal hésite un instant, scrute une dernière fois ce monde qui n’est plus le sien puis murmure : « Je vous suis mes semblables »
La colonne de rongeurs déferle dans la rue encombrée de débris. Khal suit ses frères. Sur le trottoir éventré, il y a une crevasse profonde. Cascade grisâtre, les rats s’y engouffrent. Juste en dessous, c’est le royaume des égouts.
— Maintenant, si je saute, mon corps se transformera pense Khal
Il prend son élan. Les rats ont disparu, sans doute le guettent-ils en bas. L’homme métamorphosé se jette dans le vite. Il n’a plus peur. C’est la transmigration. Bientôt, ses crocs déchireront d’appétissantes charognes ! Il ne ressent aucune douleur lorsque dans un formidable choc, sa colonne vertébrale se brise.
Les deux hommes en haillons remontent silencieusement les égouts plongés dans les ténèbres. Ils portent chacun une troche dans la main gauche, une torche, une barre de fer dans la main gauche. Ils sont affamés. Celui qui marche en tête se retourne. Sur sa figure en putrescence, on devine déjà les stigmates de la mort.
— Regarde Freddy ! Le piège a fonctionné. C’est bien la première fois que l’une de ses maudites bestioles se fait avoir.
L’autre s’approche. De ses doigts crasseux, craquelés, d’où suinte un liquide épais et jaunâtre, il écarte les mâchoires d’acier d’entre lesquelles il saisit le cadavre de l’animal. Avec une moue gourmande, il le porte devant ses yeux, léchant avidement le sang qui s’échappe de la blessure.
— Efficaces ces tapettes. Il a eu la colonne vertébrale brisée.
— Ouais, répond l’autre, en attendant, pour une fois que l’on en chope un, on n’a pas de chance. Regarde-le. Il est bien moins gras que les autres. Il a fallu que l’on tombe sur un jeune affamé !